Généralisation des tests anti-discrimination : controverse imminente à l’Assemblée Nationale

Une vive discussion est attendue à l'Assemblée concernant l'extension des tests anti-discrimination. La proposition de loi de Marc Ferracci est à l'étude ce mardi en commission à l'Assemblée. L'un des buts principaux est de rendre le processus légalement sûr. Cependant, les syndicats et la Défenseure des droits remettent en question les modalités.

Par Leïla de Comarmond

Au cours de sa dernière campagne pour la présidence, Emmanuel Macron a promis d'instaurer un "contrôle régulier" dans les grandes sociétés pour combattre les discriminations. Marc Ferracci, député de Renaissance, a présenté une proposition de loi à ce propos en juillet. Elle sera étudiée au sein de la commission des Lois à l'Assemblée mardi soir et sera débattue en séance plénière le 4 décembre.

Béatrice Clicq de Force ouvrière considère que son idée est « valable ». Cependant, le dispositif a provoqué une grande quantité de critiques vigoureuses de la part des syndicats, des groupes associatifs et de la Défenseure des droits, qui a émis un jugement extrêmement dur sur le document.

Question de solidité légale

La finalité première du projet de loi fait l'unanimité. Le but est de mettre en place à grand échelle les tests "statistiques" promis en collaborant avec des instituts de recherche. Une initiative de cette nature a déjà été lancée par le gouvernement en 2019 en ce qui concerne les recrutements, complétée par une campagne de "dénonciation publique", avec la révélation des noms des contrevenants, juste avant l'éclatement de la pandémie de Covid. Cependant, une question de solidité légale se posait.

Marc Ferracci souligne que le projet de loi "protège" ce genre de contrôle. Il stipule que les compagnies évaluées ont le droit de se défendre et un certain temps pour mettre en œuvre des actions correctives, leur identification n'étant révélée et une pénalité financière n'étant imposée que si leurs efforts s'avèrent insatisfaisants, une évaluation qui doit être réalisée par les autorités gouvernementales.

"Nos compétences fondamentales"

La composition du "groupe de supervision des parties intéressées" chargé de surveiller ces opérations est un point controversé. Bien que des délégués des entreprises et des administrations seront présents, aucun porte-parole des victimes potentielles n'était envisagé dans le projet initial. "C'est pourtant au cœur de nos compétences", déplore Lydie Nicol de la CFDT. Une modification devrait être approuvée en commission qui introduira les représentants des employés, aux côtés de ceux des employeurs.

Aussi à noter :

Un quart des employés ont déjà subi de la discrimination sur leur lieu de travail.

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Cela ne répond pas à une autre objection concernant le texte qui concerne son domaine d'application : Marc Ferracci souhaite en effet fournir aux citoyens un "kit d'outils" qui comprendrait également le développement de tests individuels. C'est-à-dire, donner la possibilité à quelqu'un dont la candidature a été refusée de réaliser un test en envoyant des candidatures fictives, par exemple des hommes s'il y a suspicion de discrimination envers les femmes.

"Actuellement, on peut compter ces tests sur une seule main", déclare tristement Marc Ferraci. "Notre idée est de les rendre accessibles à tout l'écosystème", ajoute-t-il, affirmant son désir de fixer un but quantifiable à atteindre.

Une haute compétence et plusieurs contraintes

Pour plusieurs intervenants dans la lutte contre la discrimination, l'outil, qui nécessite une compétence technique élevée, présente toutefois de nombreux inconvénients. Surtout le fait que la procédure est très pesante en comparaison avec le bénéfice potentiel pour la personne victime de discrimination. "Les procès judiciaires se concluent rarement, il faut donc concentrer nos efforts sur le système pénal et les sanctions", souligne Dominique Soppo, le leader de SOS Racisme.

Tout comme les représentants syndicaux, il déplore que le projet de loi exclut le Défenseur des droits, qui est pourtant en charge de combattre les discriminations. En effet, le texte législatif prévoit la mise en place d'un "service public" dédié à la lutte contre les discriminations qui sera placé sous la responsabilité d'un service du Premier ministre : la Direction interministérielle de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT. Un budget de 3 millions d'euros est prévu dans la loi de finances pour 2024 pour cette initiative.

Même si c'est le Protecteur des droits qui a instauré, sur instruction du chef de l'État, une ligne téléphonique pour combattre les discriminations, il est donc le point de contact évident. "Comment attendez-vous que les gens s'y retrouvent", se plaint un syndicaliste.

Comarmond Leïla

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