Aux États-Unis, les étudiants indiens surpassent les Chinois dans les universités
La crise sanitaire et les tensions avec Pékin ont entraîné une baisse du nombre d'étudiants chinois aux États-Unis, tandis que le nombre d'étudiants indiens a considérablement augmenté.
Par Véronique Le Billon
Au sein de l'université de Princeton dans le New Jersey, des élèves appliqués assistent à une leçon d'économie au sein du Julis Romo Rabinowitz Building, un ancien centre de recherche admirablement rénové. Une grande partie de ces étudiants sont d'origine asiatique.
Il n'y a rien d'étonnant à cela : lors de la rentrée universitaire 2022, parmi les 1,06 millions d'étudiants étrangers aux États-Unis (une augmentation de 12% par rapport à l'année précédente), la Chine et l'Inde ont de nouveau constitué plus de la moitié (53%) de la population étudiante, selon l'étude annuelle Open Doors de l'Institute of International Education (IIE), qui est affilié au département d'État.
Cependant, la dynamique entre les deux nations a radicalement changé : en demi-décennie, le pourcentage d'étudiants chinois aux USA a diminué de 33% à 27%, tandis que le pourcentage d'étudiants indiens a augmenté de 18% à 25%. Pendant l'année académique 2019-2020, qui a vu un nombre record d'étudiants chinois (373.000) aux USA, les Indiens ne constituaient que la moitié de ce nombre – mais aujourd'hui, ils sont presque égaux, avec 290.000 étudiants chinois et 269.000 étudiants indiens.
Action intentionnelle
La crise sanitaire a été un facteur déterminant dans le changement de tendance pour les étudiants chinois dans les institutions d'enseignement supérieur. Les mesures sévères de confinement et les limitations de déplacement n'ont été levées en Chine qu'à l'été 2022, ce qui était sans doute trop tard pour que de nombreux nouveaux étudiants fassent des demandes d'inscription à l'étranger en grand nombre.
Cependant, le changement de direction est également le résultat de tensions politiques. La méfiance entre Washington et Pékin s'est intensifiée depuis l'époque de Trump, surtout en raison d'allégations de vol de propriété intellectuelle. En mai 2020, une déclaration présidentielle avait restreint l'attribution de visas aux étudiants chinois pour les domaines liés à l'industrie militaire. Des doutes sur l'utilisation frauduleuse des fonds de recherche et des campagnes de diffamation contre les enseignants ont également alimenté une hostilité envers la Chine.
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En revanche, "les États-Unis maintiennent des liens solides avec l'Inde en matière d'éducation, qui se consolident entre nos administrations, le milieu universitaire et d'autres collaborateurs", a souligné Marianne Craven, secrétaire adjointe du Bureau des affaires éducatives, lors de la présentation de l'étude. "Nous avons une commission Fulbright très dynamique en Inde (qui offre des bourses basées sur le mérite pour les étrangers), notre ambassade est active et EducationUSA a des centres à travers le pays."
Évolution vers le haut de gamme
L'étude révèle également une stratégie d'évolution vers des programmes plus avancés : plus d'un tiers des étudiants étrangers inscrits dans des programmes d'études supérieures (Master ou PhD) proviennent de l'Inde (165 000 sur 470 000). Leur effectif a donc augmenté de 63 % l'année dernière, dépassant le nombre d'étudiants chinois, qui privilégient plus les formations de premier cycle universitaire – des formations coûteuses et peu soutenues par les bourses américaines.
Suite à la tendance des PDG indiens à la tête des grandes sociétés technologiques, trois quarts des étudiants indiens se concentrent sur les sciences, comparativement à un étudiant chinois sur deux. La majorité des étudiants internationaux sollicitent en premier lieu un visa pour poursuivre des études en sciences (STEM), en particulier en mathématiques et en informatique, qui ont vu une augmentation de 20% de leurs effectifs, atteignant 240 000, suivi de près par les cursus d'ingénierie.
Tendance mondiale
L'inversion de la tendance n'est pas uniquement observée aux États-Unis. Pour la période 2022-2023, le Canada, l'Australie et le Japon ont également noté une diminution du nombre d'étudiants en provenance de Chine, d'après le Projet Atlas. Le Canada a même particulièrement ressenti cette chute, avec une augmentation de 34% d'étudiants indiens et une baisse de 24% d'étudiants chinois en un an. Seul le Royaume-Uni a connu une augmentation du nombre d'étudiants chinois.
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Cependant, la Maison Blanche veut clairement démontrer, comme lors de la rencontre très médiatisée entre Joe Biden et Xi Jinping le mercredi, qu'elle n'a pas l'intention de séparer les deux économies. "Nous sommes très heureux d'accueillir les étudiants de la Chine en Amérique. Ils sont une priorité et sont très appréciés par les universités américaines", réaffirme Marianne Craven.
Les institutions d'enseignement supérieur aux États-Unis ne souhaitent certainement pas perdre le soutien financier provenant de la Chine. Cependant, elles ont également commencé à explorer d'autres pays, en particulier le Vietnam, qui est devenu un partenaire commercial crucial pour les États-Unis. Par ailleurs, la population d'étudiants américains en Chine a considérablement diminué en raison de la pandémie : aujourd'hui, ils ne sont plus qu'entre 200 et 300, comparé à 12 000 il y a quelques années.
Véronique Le Billon (Bureau à New York)
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