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Budget 2024 : Cinq amendements majeurs concernant l’immobilier, la retraite et le Livret A retenus par le gouvernement

Le gouvernement a récupéré cinq modifications relatives à l'immobilier, la retraite et le Livret A dans le Budget 2024. La Première ministre a utilisé l'article 49-3 pour approuver la section des dépenses du budget 2024. Ces modifications sont directement liées aux finances personnelles des ménages.

Par Marie-Eve Frénay

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Après avoir engagé la responsabilité du gouvernement sur la première moitié du projet de loi de Finances 2024, dédiée aux revenus, le 18 octobre, Elisabeth Borne a utilisé une deuxième fois l'article 49-3 le 7 novembre, cette fois sur l'aspect des dépenses du budget 2024. En conséquence, le document a été modifié, le gouvernement ayant pris en compte des modifications supplémentaires, les siennes propres, mais aussi quelques unes proposées par les élus de Renaissance, Horizons, Liot et Les Républicains.

Le PLF introduit plusieurs nouvelles régulations qui affectent directement ou indirectement les finances personnelles des individus, notamment en termes d'épargne, d'impôts et de financement pour la rénovation de leurs résidences. Voici un aperçu de cinq d'entre elles.

1. Élimination des critères de revenus pour l'emprunt anticipé pour rénovation

Initié le 1er janvier 2022 pour les familles à faibles revenus, l'emprunt anticipé pour rénovation, également dénommé prêt de mutation anticipé, est destiné à couvrir les coûts de travaux de rénovation énergétique. Par exemple, l'argent peut être utilisé pour isoler son toit ou ses murs, remplacer des fenêtres, installer un système de chauffage respectueux de l'environnement, à condition que les travaux soient exécutés par un spécialiste possédant le label RGE (reconnu garant de l'environnement).

Une autre caractéristique unique de ce financement concerne comment il est remboursé. L'attrait de ce prêt ne réside pas tant dans le taux d'intérêt, qui est à la discrétion des banques, mais plutôt dans le calendrier de remboursement. Le remboursement du prêt se fait lorsqu'il y a un changement de propriétaire de la propriété pour laquelle les travaux ont été effectués. Cela signifie que le remboursement se produit lors d'un don, d'une vente de la propriété, ou au décès de l'emprunteur.

Afin d'encourager les banques à l'offrir – pour l'instant, seul La Banque Postale et le Crédit Mutuel proposent le prêt avance rénovation -, l'Etat offre une garantie couvrant 75% du montant. Cette garantie s'accompagne d'une hypothèque sur la propriété immobilière. Cependant, jusqu'à maintenant, le prêt avance mutation est rarement sollicité.

D'après l'entité qui supervise les finances et la garantie pour l'accession à la propriété sociale, la SGFGAS, qui travaille au nom du gouvernement, le fonds de garantie de ce prêt (FGRE), a seulement émis 46 prêts pour l'avance de mutation en 2022, totalisant 1 million d'euros. Selon les dernières données publiées, le nombre de prêts est passé à 14 au premier trimestre 2023, avec un financement total de seulement 320 000 euros.

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Afin d'élargir la distribution, le gouvernement a approuvé une proposition d'amendement de la part des représentants Renaissance. Selon cette proposition, le fonds alloué au FGRE augmenterait de 1 million d'euros. "Cette augmentation des ressources du FGRE permettra de supprimer les restrictions actuelles sur les ressources, qui limitent les familles qui souhaitent obtenir un prêt pour des travaux de rénovation énergétique dans leur maison, soutenu par une garantie du FGRE", argumentent les députés.

Actuellement, le crédit pour rénovation est attribué aux foyers à revenus modestes, qui sont propriétaires de leur résidence principale, sous condition que leurs revenus annuels ne dépassent pas un certain seuil fixé par la loi. A titre d'exemple, en 2023, une personne seule vivant hors de l'Ile-de-France doit avoir des revenus annuels ne dépassant pas 20.805 euros, par rapport à 27.343 euros si elle habite en Ile-de-France.

2. Un système de tarification au kilomètre moins avantageux pour les véhicules qui polluent

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu, l'administration a également retenu une proposition avec un objectif environnemental. Proposée par le groupe Horizon, son but final est de changer le système de tarification au kilomètre utilisé par les contribuables pour déterminer les coûts professionnels engagés et les déduire de leurs revenus avant de les imposer.

Le calcul kilométrique tient compte non seulement de la distance parcourue, mais également de la puissance du véhicule. Ainsi, pour une même distance parcourue, si la voiture a un moteur plus puissant, le contribuable a la possibilité de déduire une plus grande somme pour ses dépenses kilométriques. Cela a du sens car une voiture plus puissante consomme plus de carburant. Cependant, cela ne pousse pas les conducteurs à opter pour des voitures plus respectueuses de l'environnement. Il est tout de même à noter que pour les voitures électriques, le total des frais de déplacement calculés à partir du calcul kilométrique est augmenté de 20%.

Même si il est crucial de prendre des mesures pour la transition écologique, cette méthode de calcul des coûts kilométriques favorise de manière significative les véhicules les plus nuisibles pour l'environnement comparé à ceux qui sont moins polluants. En effet, selon le rapport Secten, la majorité (32%) des émissions de gaz à effet de serre en France en 2022 proviennent des transports. Ainsi, l'automobile se présente comme un outil clé dans la bataille contre le réchauffement climatique, comme le soulignent les députés.

Cependant, leur proposition ne vise pas à modifier directement le système de tarification, mais à solliciter le gouvernement pour examiner la possibilité de sa révision. Si ce document est finalement approuvé, l'autorité exécutive devra présenter au Parlement avant le 1er septembre 2024, "un rapport sur la pertinence de revoir le système des frais kilométriques en tenant compte des émissions de gaz à effet de serre du véhicule plutôt que de la puissance administrative du véhicule", suggèrent les représentants d'Horizons.

3. Utilisation du Livret A pour le financement de la défense

Les économies accumulées dans les Livrets A des ménages ne seront plus uniquement consacrées au financement du logement social et de la rénovation urbaine. Elles seront également utilisées pour soutenir l'industrie de la défense. C'est l'objectif d'un amendement proposé par trois politiciens – Christophe Plassard d'Horizons, Thomas Gassilloud de Renaissance et Jean-Louis Thiériot des Républicains -, qui a été intégré dans la version du projet de loi de finances visée par l'article 49.3.

En conséquence, l'article L221-5 du code financier et monétaire qui supervise l'utilisation des livrets régulés serait désormais formulé de cette manière : "Les fonds récoltés par les institutions qui proposent le Livret A ou le livret de développement durable et solidaire […] sont utilisés par ces institutions pour soutenir financièrement les petites et moyennes entreprises, en particulier pour leur fondation et leur croissance, pour le financement de projets favorisant la transition énergétique ou la diminution de l'impact sur le climat, pour le soutien financier des entreprises, en particulier petites et moyennes, de l'industrie de défense française, ainsi que pour le soutien financier des entités juridiques […] liées à l'économie sociale et solidaire".

L'idée a été envisagée bien avant le PLF. En fait, en juin dernier, lors de l'élaboration du projet de loi de programmation militaire, le Sénat avait voté pour l'établissement d'un "livret d'épargne souveraineté". Cependant, cette proposition avait été rejetée par le Conseil constitutionnel, jugeant qu'elle n'était pas pertinente dans le contexte de la loi de programmation militaire. Ainsi, l'idée refait surface lors de l'établissement du budget pour 2024, cette fois avec le soutien de l'exécutif.

Cette détermination doit être soutenue par des actions concrètes. En effet, la modification proposée cet automne contraint le gouvernement à présenter un rapport au Parlement avant la fin de 2026 pour évaluer les répercussions sur le budget de l'État et l'efficience du système.

4. Certains ingénieurs pourront partir en retraite sans réduction à 59 ans

La contestée refonte des retraites du printemps dernier a conduit à des changements dans les conditions de départ à la retraite, en accélérant notamment le planning initialement fixé par la réforme Touraine en 2014. En particulier, pour bénéficier d'une retraite sans réduction, la durée de cotisation nécessaire sera augmentée d'ici 2027 de 42 à 43 ans. Cette réduction représente la sanction imposée aux cotisants qui n'ont pas accumulé assez de trimestres lorsqu'ils souhaitent bénéficier de leur droit à la retraite.

En général, cette pénalité ne s'applique pas aux départs après l'âge de 67 ans. Cependant, certaines carrières ne sont pas soumises à cette réduction, ou du moins, pas de la même manière. Par exemple, les militaires peuvent partir en retraite plus tôt sans pénalité. Après la réforme des retraites mise en œuvre en avril, une profession a été négligée, l'amenant légalement à ne pas profiter d'une suppression de la réduction plus tôt. Il s'agit des ingénieurs en contrôle du trafic aérien.

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Le gouvernement a soumis l'amendement numéro 2.274 qui corrige une erreur matérielle après l'adoption de la loi n° 2023-270 du 14 avril 2023. Cette loi concerne le financement correctif de la Sécurité sociale pour 2023. Elle réinstaure l'âge limite de 59 ans, au-delà duquel la réduction est supprimée pour les ingénieurs de contrôle de la navigation aérienne, correspondant à l'âge limite lié à leur profession, comme l'indique le gouvernement.

5. Vers une réduction des bénéfices fiscaux dans les territoires d'outre-mer

Certains bénéfices fiscaux disponibles pour les individus pourraient être remis en question, comme c'est le cas pour le dispositif Pinel qui prendra fin en 2024. Cependant, ce mécanisme fiscal lié à l'immobilier locatif n'est pas le seul à être critiqué. En juillet dernier, l'Inspection générale des finances (IGF) avait examiné les subventions pour les investissements dans les régions d'outre-mer.

L'Inspection Générale des Finances (IGF) rapporte que le Régime d'Aide Fiscale à l'Investissement Productif (RAFIP) en territoires d'outre-mer comprend cinq mesures fiscales, totalisant 827 millions d'euros en 2022. Ceci inclut notamment des allégements fiscaux sur le revenu liés aux investissements immobiliers locatifs, à la participation au capital de certaines entreprises, ainsi qu'aux travaux de rénovation de logements (selon l'article 199 undecies A du code général des impôts). Il comporte également des réductions d'impôts sur le revenu associés aux investissements productifs effectués en outre-mer (conformément à l'article 199 undecies B du CGI).

De nombreux rapports administratifs et législatifs axés sur l'efficience de ce mécanisme depuis 2017 concordent sur le fait que son ciblage n'est pas parfait, que le montant et la distribution des dépenses fiscales sont flous et qu'il est difficile de mesurer son influence réelle sur le secteur productif outre-mer, concluait l'IGF cet été. En conséquence, elle suggérait que l'administration fournisse chaque année un compte rendu chiffré de ces mécanismes fiscaux au Parlement.

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Jean-René Cazeneuve, un député Renaissance et le rapporteur principal de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, a repris cette suggestion dans un amendement qui a été approuvé par le gouvernement. "L'article 120 de la loi de finances de 1992 stipule qu'un rapport annuel doit être présenté au Parlement, portant sur l'approbation des investissements dans le cadre du régime de soutien fiscal à l'investissement productif outre-mer. L'Inspection générale des finances […] souligne que ce rapport n'est plus présenté au Parlement depuis le début des années 2010 et recommande de renforcer l'information fournie au Parlement", dit-il.

Par conséquent, le parlementaire suggère que chaque année, avant le 30 septembre, le pouvoir exécutif fournisse "une évaluation des décisions requérant une approbation, le prix des investissements effectués pour chaque dépense fiscale ainsi que leur répartition par branche d'industrie et par région productive en outre-mer", stipule son amendement.

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