Inclusion et handicap: les sociétés progressent graduellement
Que le handicap soit physique, intellectuel, sensoriel ou mental, il reste mal compris par les employeurs. Cependant, il existe des adaptations et des ressources pour soutenir les employés handicapés, à condition que l'entreprise s'engage sincèrement à les recruter et à les garder au travail.
Par Marie Dupont
La majorité des employeurs, soit 67%, trouvent compliqué le recrutement de travailleurs handicapés. Cependant, 35% d'entre eux pensent que l'intégration de ces personnes est un objectif majeur pour les sociétés, un chiffre en hausse de 7% par rapport à 2021. Ces données, provenant de l'étude Agefiph – Ifop de décembre 2022, illustrent l'opposition entre le désir d'inclusion et les obstacles, qu'ils soient perçus ou réels, à l'intégration des personnes handicapées en milieu professionnel.
Selon les chiffres de la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques), le taux d'emploi direct pour 2021 est de 3,5 %. Cela se produit alors que, depuis 1987, les entreprises avec plus de 20 employés sont tenues par la loi d'avoir 6 % de leur personnel composé de travailleurs handicapés. Si un employeur ne se conforme pas à cette réglementation, une cotisation annuelle doit être versée à l'Agefiph, l'organisation chargée de gérer les fonds pour l'intégration professionnelle des personnes handicapées.
En réalité, lorsqu'on est confronté à une éventuelle discrimination lors de l'embauche, on se demande naturellement s'il faut mentionner son handicap ou non. "Cela dépend essentiellement de la politique de l'entreprise. Plus cette dernière met en place des initiatives de communication pour favoriser l'inclusion, plus l'employé se sentira à l'aise pour s'exprimer", déclare Dr Iliopoulos, directrice médicale adjointe de l'association Arihm Conseil. Au-delà des quotas, idéalement, les entreprises cherchent à créer des environnements de travail où les employés se sentent tout aussi à l'aise pour discuter de leur handicap ou pour garder le silence à ce sujet.
Des ressources et des ajustements
D'après le baromètre Agefiph – Ifop, deux tiers des responsables de recrutement pensent qu'un spécialiste du handicap en entreprise est crucial pour favoriser l'inclusion des employés en situation de handicap. Ces experts, généralement liés à la mission handicap des départements des ressources humaines, facilitent l'adaptation du poste de travail, tout en identifiant et prévenant les incapacités. "Nous intervenons sur divers aspects comme les transports, l'accès aux installations, l'ergonomie du travail, les heures de travail, et l'assistance à l'acquisition d'équipements tels que des chaises roulantes ou des prothèses," explique Yamina Segeon, responsable de la lutte contre la discrimination au CNFPT, une institution de formation pour les fonctionnaires qui compte plus de 10% de personnes handicapées parmi ses employés.
Plus une société met en œuvre des initiatives de communication pour promouvoir l'inclusion, plus il sera facile pour l'employé de s'exprimer. C'est ce que déclare Dr Iliopoulos, la Directrice médicale adjointe de l'association Arihm Conseil qui soutient les individus.
Les entreprises peuvent bénéficier d'un soutien financier pour aider à l'inclusion des personnes handicapées. Les entreprises privées peuvent demander de l'aide à l'Agefiph, tandis que le secteur public peut solliciter le FIPHFP (Fonds pour l'insertion des personnes handicapées de la fonction publique). "Chaque année, nous concluons un accord avec le FIPHFP, dépensant environ un million d'euros pour soutenir nos employés handicapés", affirme Yamina Segeon. Les entreprises et leurs employés peuvent également obtenir des conseils sur des sujets spécifiques grâce à des organisations comme Arihm Conseil, qui se spécialise dans les handicaps psychiques, cognitifs et mentaux, un domaine du handicap encore largement méconnu.
En plus des ressources mises à disposition des employeurs, l'organisation soutient les employés handicapés dans l'ajustement de leur environnement de travail ou de leur planification, grâce à l'accompagnement et des outils de gestion du temps et d'organisation. "Nous ne prenons pas la place du médecin personnel, cependant nous intervenons au premier plan pour les soutenir à reprendre leur traitement si celui-ci a été interrompu. Ils nous écoutent parce que nous sommes impartiaux et ils se sentent à l'aise avec nous", déclare le Dr Iliopoulos.
Construire des équipes diversifiées
L'intégration ne se limite pas seulement à l'adaptation du travail et du temps de travail, mais comprend également la formation des équipes, du personnel d'embauche aux gestionnaires. L'objectif principal est d'empêcher toute discrimination lors du recrutement, tout en sensibilisant à la diversité des individus et en établissant un système de travail qui convient à tous. « En tant qu'organisme de formation agréé, nous organisons des formations selon les besoins des entreprises, sur des sujets spécifiques pour leur fournir les moyens de mieux gérer le handicap », déclare la directrice médicale adjointe d'Arihm Conseil.
La Story – Handicap : comment le rendre moins apparent au sein de l'entreprise 1/2
Les formations et initiatives proposées par diverses entités publiques et organisations permettent de faciliter la vie quotidienne de l'employé handicapé, mais aussi celle de ses collègues. « L'équipe a besoin de comprendre pourquoi certaines tâches sont adaptées ou allégées. Il est donc nécessaire, en accord avec l'employé, de dialoguer avec ses collègues et d'expliquer les recommandations du médecin du travail ou de prévention, sans entrer dans les détails spécifiques du handicap, afin d'éviter des tensions au sein de l'équipe », explique le docteur.
Les associations ont aussi la possibilité d'intervenir en amont de l'embauche d'un travailleur handicapé, afin de mettre en place les aménagements nécessaires en collaboration avec le personnel et les dirigeants. Toutefois, il arrive que suite à une maladie ou un accident du travail, la reprise de l'emploi ne soit pas envisageable et que le médecin déclare l'inaptitude du salarié. Dans ce cas, l'entreprise doit s'efforcer de repositionner son employé dans un autre rôle, en prenant en compte son état de santé. Il faut cependant noter que l'entreprise est tenue par une obligation de moyen pour le reclassement, et non une obligation de résultat.
La Saga – Comment rendre le handicap invisible au sein des entreprises 2/2
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